Les galentines vertigo by two

VERTIGO BY TWO

16 Nov 2020

Vertige, n.m (latin vertigo, -inis, de vertere, tourner) : trouble, exaltation, égarement dû à quelque chose d’intense

Le vertige, voilà le mot qui me vient à l’esprit lorsque je m’arrête et que je regarde en arrière. Ces dix derniers mois m’ont donné le vertige de bien des manières, un bon nombre de fois et pour des raisons bien différentes. Le vertige, je le ressens lorsque je plonge chaque matin au réveil dans les deux paires d’yeux bleus de mes deux petits bébés. Lorsque leurs sourires me cueillent entre deux tâches, entre deux biberons… Lorsque leurs rires habillent le silence paisible de notre maison.

Maman de jumeaux, me voilà. 31 ans depuis peu, jeune maman donc depuis le 8 octobre 2015. Si quelqu’un me l’avait prédit il y a 10 mois de cela, j’aurai certainement réagit avec angoisse en me disant “Mon Dieu, deux bébés d’un coup ! Nous n’y arriverons pas ” et secrètement, inconsciemment j’aurai chéri cette idée. Car je serai enfin devenu maman, moi qui ai par la force des choses douté de longs mois sur cette finalité. Car oui, c’est bien là tout le paradoxe des couples qui passent par la PMA, nous nous armons de courage, nous allons de l’avant à travers toutes ces longues étapes qui nous permettront PEUT-ETRE de devenir parents un jour. Alors, lorsque vient le jour tant attendu du transfert d’embryons, même si cela nous fait peur, nous souhaitons mettre toutes les chances de notre côté et nous nous voyons demander, timidement, tout doucement « Pourrions-nous en implanter deux ? » Comment devions-nous poser la question, y avait-il un moment précis à respecter, une façon précise de le faire ? Nous l’avons posé tout simplement, et Dieu (c’est comme cela que nous avons surnommé notre médecin en PMA) nous a répondu “Au vu de votre âge et de votre dossier médical je n’y vois pas d’inconvénient. C’est d’accord !” Ce jour là, sans le savoir vraiment nous avions scellé notre destin. Et nous étions entrés dans ce que j’appelle aujourd’hui le VERTIGO BY TWO.

Lorsque le temps de la première échographie fut venu, mon mari et moi (bon ok surtout moi) étions dans un état de stress comme nous l’avions rarement été auparavant. Je me suis vu pratiquer les exercices de respiration que l’on nous montre pour un accouchement. Pire que le jour du bac, pire que pour tous mes examens de violon réunis… l’angoisse totale. Est-ce que tout allait bien ? Est-ce que notre 1ère FIV allait réellement tenir ? L’embryon était-il bien accroché ? Etait-il bel et bien là (car même si les tests sanguins révélaient bien une grossesse, on en vient à douter de tout en PMA) ? Dieu me parle, articule devant moi et je ne comprends rien, je n’arrive pas à me concentrer. Je me vois juste répondre « très fatiguée » à la question : « Comment vous sentez vous ? » Mon mari arrive à la rescousse et explique que je suis anormalement anxieuse et je remercie Dieu d’abréger mon attente en me dirigeant vers la salle d’examen. Lorsque l’écran s’allume et qu’il révèle deux poches, deux embryons, Dieu nous lance. « Ah oui, je comprends pourquoi vous êtes fatiguée ! Vous n’avez rien contre les jumeaux ? » Incrédules , nous répondons d’une voix blanche « Non ». « Et bien vous attendez deux bébés, Félicitations ! » : VERTIGO BY TWO !!!!!

Rires nerveux, échanges de regards émerveillés, mille questions qui surgissent en une fraction de seconde, trouble, exaltation, anxiété due à cette nouvelle absolument magique et terrifiante : nous allons être parents et de deux bébés d’un coup ! « Nous n’y arriverons jamais ! C’est tellement génial ! Maman j’ai peur ! » Voilà le mélange de sentiments qui nous a envahi. Ma maman c’est bien la première personne que j’ai appelé en sortant du cabinet du médecin. Je redoutais sa réaction, car lorsque nous lui avions annoncé que nous allions faire une FIV, elle m’a répondu « Tu ne vas pas avoir des triplés hein ?! ». Ce fut finalement un « Alors ???? Non mais sérieusement allez ! Ah oui non mais vraiment ? Des jumeaux ? Vraiment deux bébés ????!!! Oh mais c’est incroyable… » Je ne me suis pas éternisée et l’ai laissée digérer la nouvelle tout en sentant que le VERTIGO BY TWO l’avait également touché.

Ce fameux vertige ne nous pas quitté tout au long de mes 7 mois de grossesse : les complications, la peur et le risque de les perdre au 1er trimestre, l’alitement, les contractions arrivées bien trop tôt, les longues semaines en néonatalogie… Mais aussi et surtout le vertige de la rencontre de ce 8 octobre, le premier si petit visage que l’on amène près du mien pour que je l’embrasse, le deuxième petit visage si parfait qui suit, ce soulagement incroyable de me dire ils sont là, ils respirent, ils vont bien « On l’a fait ! On a réussi ! J’ai réussi !!! » Cette reconnaissance magique qui s’opère, indescriptible « Ce sont eux, ce sont bien les miens, je les reconnais, ils ont tout, ils sont parfaits ! Enfin je vous vois ! »

Cette journée et les trois qui suivront nous les avons vécu en lévitation. Du bonheur en perfusion. Avant que la multitude de questions et de craintes liées à la prématurité ne nous assaillent : VERTIGO BY TWO !!!!!

Aujourd’hui, le vertige continue. Le vertige d’un émerveillement au quotidien de voir nos deux bébés en bonne santé évoluer sous nos yeux. Nous entendons et lisons beaucoup de choses sur les jumeaux. Une chose est sure c’est que nous avons eu une chance incroyable de vivre cette aventure et que jamais au grand jamais nous n’avons regretté un seul instant (même dans les pires moments) d’avoir timidement posé cette question : « Pourrions nous en implanter deux ? »

 

Maia Emerit